Bonjour à tous,
Nous revoici pour la 14e et 15e semaine de notre périple Venise Sans Stress. Ce journal comporte exceptionnellement 2 semaines car j’ai pris trop de retard en écrivant la première et on ne voulait pas trop chambouler notre rythme de communication. 2 fois plus de durée pour 2 fois plus de plaisir. Après ces quelques jours hors du temps entre les thermes et les météores, c'est un retour brusque à la réalité qui attend nos 3 protagonistes. Et par dur retour à la réalité, j'entends une seconde nuit au chaud à l'hôtel avant de quitter Lamia (il faisait déjà nuit à notre retour...).
A la sortie de la ville nous attend un joli col de 900m qu'on engloutit aussi vite que notre petit-déjeuner du matin. C'est en revanche une des descentes les plus plaisantes depuis le début du voyage. Une pente douce avec de longs virages pendant plusieurs kilomètres et un léger vent dans le dos. Sur les 13 kms suivants le sommet, nos athlètes français ont gardé une allure moyenne de 31km/h. L'équivalent de 6 fois l'allure moyenne d'un homme qui marche. Impressionnant. On s'arrête ensuite dans un village glauque pour le déjeuner. On tente le bouillon cube dans l'eau des pâtes pour la 1ère fois et on se sent comme au restaurant.
Une trentaine de kilomètres plus tard, on décide de camper devant une gare abandonnée depuis une dizaine d'années. Tout est d'époque, même le monsieur qui buvait seul sur un des bancs près des rails. Hormis ce fait, il est très gentil et surtout heureux d'avoir de la compagnie. Emilien discute un moment avec lui et accepte même un petit verre de son vin ma foi peu appétissant.
Mis de côté le chien de malheur qui a braillé à plusieurs reprises pendant la nuit, on se lève en forme sur les coups de 7h.
On roule tranquillement en direction de Larisa où on s'arrête le midi déguster de bonne grosses tartes. Le mauvais temps nous suit depuis quelques jours, il se met à pleuvoir après manger. Ce détail n'est pas anodin car à cause de la route mouillée, Emilien dérape et tombe en prenant un virage...
C'est la 1ère chute en roulant depuis le début de l’aventure. Heureusement on se fait plus de peur que de mal car mis à part quelques égratignures, le vélo n'a rien. Emilien aussi soit dit en passant. On s'en sort bien cette fois-ci mais cela nous sert à tous de piqure de rappel pour la suite. Encore un chien qui aboie toute la nuit... Je n'ai presque plus aucune affinité pour cette espèce. On se lève a 7h, il pleut. Le village se rendort. 1h30 plus tard rien n'a changé, le village se lève. C'est la première fois depuis le début du voyage que l'on prend le petit dej sous la pluie, on s'en sort plutôt bien. C'est donc impossible de faire sécher les tentes et le tarp avec cette météo, une bonne odeur nous attendra ce soir... On croise des sangliers sur la route, c'est une première pour nous 3 qui n'en avons vu que dans Asterix. Ils sont moins appétissants en vrai... Depuis la reprise, on s'essaye a des rythmes de vies un peu différents car on profite d'être a 3 pour expérimenter de nouvelles choses. En effet entre les journées qui se raccourcissent et le froid qui s'intensifie on se dit que nos habitudes journalières ne sont peut-être plus compatibles. L'idée lumineuse du jour est de ne pas manger le midi pour s'arrêter plus tôt que d'habitude et ne pas avoir à se dépêcher pour monter les tentes avant le coucher du soleil (à 17h). On roule donc une soixantaine de kilomètres le ventre quasi vide avant d'arriver a Keratsini. Et forcément une distance pareille ça creuse !
On s'arrête dans une boulangerie allemande où on achète plein de bêtises à déguster sur leur terrasse. Le gérant a l'air d'apprécier notre compagnie et notre voyage puisqu'il commence à nous offrir un tas de vivres. On le remercie du fond du cœur !!
Mais comme dit le dicton ; le temps passe vite lorsqu'on mange bien. (?) On oublie totalement l'heure et on se rend compte qu'il nous reste moins de 30 minutes d'ensoleillement pour trouver un spot pour camper. Le gérant de la boulangerie souhaite nous montrer un endroit propice selon lui, on le suit. On le remercie poliment alors qu'il nous amène devant un vieil immeuble lugubre abandonné et collé à la route.
Le temps presse et on arrive toujours pas à sortir de la zone industrielle de la ville... Tous nos espoirs d'endroits sympathiques et isolés s'envolent, on terminera par poser nos tentes juste à côté d'un concessionnaire de voiture, on aura vu mieux.
Imaginez vous aller au travail un mercredi matin. En arrivant devant vos locaux un peu au milieu de nul part, vous tombez sur 3 jeunes bien trop à l'aises qui se font un petit brunch sur la terrasse de l'entrée, thé à la main. Après quelques minutes de totale incompréhension on leur explique pourquoi on s'est retrouvé là et leur méfiance se dissipe. L'objectif du jour se nomme Thessalonique, où mon amie du lycée Alexia accepte de nous héberger pour la 1ère nuit. En théorie c'est à 70km, mais en pratique on est loin du compte.
Avant de vous expliquer ça, j'aimerais faire un aparté pour parler de la semi chute d'Emilien qui termine un pied dans une grosse flaque d'eau boueuse. Le genre de situation hilarante pour tout le monde sauf pour toi. On en revient au récit. Généralement on apprécie plutôt les sentiers, mais quand il a plu et que la boue se bloque entre la roue et le garde boue (porte très bien son nom) empêchant le vélo d'avancer, c'est moins rigolo. On fait donc plusieurs détours pour passer par des grands axes sans vraiment surveiller la distance que ça nous rajoute. Soudain, panique ! Il est 15h, et les 70km initiaux se dont doucement transformé en 120. A 2h avant le coucher du soleil, le timing est plus que tendu, mais on se refuse à abandonner. On passe alors en formation "train" (à la file) et Emilien passe en mode Super Sayan. A haute vitesse, l'individu à l'avant du train se fatigue théoriquement très vite. Emilien non. Il continue son lead jusqu'aux portes de Thessalonique à un rythme fou. C'était clairement l'effort le plus intense depuis le début du voyage.
Après ces heures de lutte, on atterrit enfin chez Alexia ! Elle est avec ses 2 soeurs venues lui rendre visite pour les fêtes. Le courant passe super bien entre tout le monde mais notre stock d'énergie est à zéro (vous pouvez le voir dans nos yeux) et on ne fera pas long feu. A la suite d'un sommeil comateux bien mérité, on se décide à nettoyer les vélos et sacoches qui n'ont pas apprécié la boue hier. Une fois chose faite, nous déménageons toutes nos affaires chez Jan, un berlinois que j'avais rencontré à Athènes et qui nous a proposé de squatter chez lui le temps de quelques jours. Seuls 2 de ses collocs sont restés à Thessalonique pour les fêtes. C'est des français et ils ont invités respectivement 2 et 4 autres copains de France à passer les vacances chez eux. Cela fait donc ni 4 ni 8 ni 10 mais bien une colloc de 13 personnes (dont 12 français) pour les jours à venir. Après l'expérience en demi-teinte à Athènes, on se réjouit d'autant de rencontres et d'activités pendant notre séjour ici.
Senghor nous rejoint en fin d'après-midi ; cela faisait maintenant plus de 2 semaines que l'on s'était séparés. Il a beau être mon pire ennemi, ce serait mentir de dire qu'on est pas content de le retrouver. Il nous raconte toutes ses aventures rocambolesques de la semaine passée, il est passé par toutes les émotions et petits pépins possibles et imaginables. Peut-être un jour vous les détaillera-t-il sur notre site ;)
Je ne m'éterniserai pas sur notre quotidien à Thessalonique, mais partez du principe qu'on s'est bien amusés.
Il y a tout de même une tâche au milieu de ces beaux jours. Nos pass sanitaires expirant tous mi-janvier, on doit impérativement se faire vacciner avant de quitter la Grèce pour continuer le voyage sans accroc. Sauf qu'il faut savoir que le système administratif de la Grèce a environ le même rendement qu'une session de révision en rentrant de soirée bien arrosée. Ça marche pas. La démarche s’effectue de la façon suivante ; pour se faire vacciner en Grèce, il faut un numéro de sécurité social grec ; jusque la tout va bien. Pour obtenir son numéro de sécurité social, il faut se rendre à la KEP, qui sont les bureaux administratifs par lesquels toutes les démarches passent. C'est la que ça se corse. Car non seulement il est quasi impossible d'éviter une attente interminable pour s'y rendre, mais qu'une fois dedans, la partie ne fait que commencer. En effet, les pignoufs qui y travaillent n'ont pas l'air de comprendre ce qu'ils font, ou alors se refusent à le faire correctement. Bien entendu la plupart des salariés ne parlent pas anglais, ça serait trop facile. Revenons en à la procédure : une fois ce numéro de sécu en poche, il ne vous reste qu'à attendre une durée parfaitement indéterminée pour qu'il soit activé. Certains disent 2 semaines, d'autres 1 mois, d'autres 1h, on se sent comme au bistrot du coin. Une fois le délai passé, le numéro permet de prendre rendez-vous pour une vaccination. Pour vérifier que le numéro est valide, il faut se rendre en pharmacie. Attention tout de même à ne pas tomber sur un pharmacien qui se tromperait et vous enverrait à l'hôpital alors que votre numéro est encore en attente. Auquel cas, vous aurez à passer quelques heures en attente dans un hôpital public où personne ne comprend votre situation. Il faut aussi réussir à éviter la fameuse technique du renvoi de la balle dans le camp de la KEP, pour une perte de temps maximale. Qu'à cela ne tienne, l'hôpital nous propose de repasser le lendemain matin pour régler la situation. Eureka ! Le lendemain le numéro est bien actif !! Par contre, le gentil Mr de la KEP n'a pas renseigné que vous vous êtes déjà fait vacciné en France, et le dossier apparait comme un début de schéma vaccinal... Il faut donc retourner expliquer la situation dans cet endroit exécrable où l'homme qui me reçoit ose me faire la morale en affirmant que je suis en retard dans mes vaccins.
Bref, après 5h d'attente dans la matinée, je me fais enfin vacciner ! Avec autant d'allers-retours ces derniers jours, j'ai eu droit a un applaudissement des médecins pour me féliciter d'avoir survécu à tout ça. J'en profite pour immortaliser ce moment avec une photo souvenir. Pour Emilien et Senghor l'histoire est relativement similaire, on s'est tous les 3 fait vacciner à quelques jours d'écart. Malheureusement pour Rannou, la situation est plus délicate. Son numéro de sécurité sociale n'est toujours pas activé et n'apparaît pas dans le système. L'hôpital refuse donc de le vacciner car son numéro n'existerait pas et la KEP refuse de lui faire un nouveau numéro car il en a déjà un. De quoi devenir fou... Petite photo illustrative face à un bureau KEP fermé.
Malgré cela, Rannou reste positif... au COVID ! Une accumulation de poisse qu'on aurait pensé impossible pour le talisman du groupe. Dans nos fréquentations des derniers jours plusieurs cas positifs se sont dévoilés. Rannou montrant aussi certains symptômes, on s'est donc fait testés. On est tous les 3 négatifs mais ça ne devrait pas durer. Heureusement notre mode de vie quotidien est fortement compatible avec une situation de quarantaine. Jeudi 6 janvier 2022
Reprise du vélo !
On remercie une dernière fois Jan pour l'accueil, le séjour à Thessalonique n'aurait pas été aussi mémorable ailleurs.
On roule à douce allure de sorte à pouvoir discuter sur la route car on est tous heureux de retrouver le groupe au complet. La sortie de la ville donne lieu à un mini col de 500m avant de continuer vers l'est. Au final le bilan de la matinée est maigre, a peine 15/20 kilomètres au compteur, mais comme dit si bien Rannou, « on n'est pas pressé ». Une fois arrivés au sommet, on se retrouve devant un beau panorama. On fait face à un océan de nuages situé quelques dizaines de mètres sous notre altitude. Une bonne excuse pour s'arrêter plus tôt que prévu pour la pause dej.
On y rencontrera Emilie, une voyageuse en van partie de France il y a 4 mois. Elle voyage majoritairement seule on lui pose donc plein de questions sur ses expériences. On est surpris d'apprendre que même en van, la météo orchestre aussi son quotidien et son état d'esprit. Bon, il faut préciser qu'elle n'a pas de chauffage, mais on se sent moins seul dans cette galère. Après une descente pas vraiment méritée, on se décide de faire des courses pour le soir. Pensant avoir la carte bleue de l'association, je me porte volontaire pour y aller. Pour une des rares fois dans ma vie le problème n'était pas le manque de volonté mais bien le manque de porte-monnaie. Comme un bleu, j'ai oublié mon porte-monnaie le matin chez Jan.
Il est presque 16h, il reste environ 1h30 d'ensoleillement et 40km pour retourner au point de départ. Ni une ni deux j'enfile mes bottes de sept lieues et je n'avance pas plus vite qu'avec mes chaussures normales. Je me retrouve à remonter ce mini col à toute vitesse alors que le soleil se couche. Mais ce n'est pas tout. Plus je monte, plus le brouillard s'intensifie, je ne peux pas voir à plus de 20m en devant, chouette. Au final je m'en sors indemne et je retrouve jan et ses collocs pour une dernière soirée ensemble. Avec en bonus un vrai repas que mes compatriotes envient depuis notre modeste réchaud. Après la course contre la montre de la veille, place au chemin retour. Lever à 6h en espérant les rejoindre avant qu'ils ne se mettent en route.
Je repasse par les mêmes routes embrumées, mais cette fois-ci c'est beaucoup plus plaisant. Comme souvent en vélo, je me laisse perdre dans mes pensées. La tête dans les nuages (dans les deux sens du termes), on se surprend régulièrement à se projeter, à s'imaginer constamment de quoi sera fait l'avenir. Étonnement, c'est rarement sur le futur proche que se portent ces réflexions, du moins en ce qui me concerne. Mais plutôt sur le chemin retour, les derniers mois du voyage, notre arrivée en France, les retrouvailles avec la famille, les amis. Mais surtout, et c'est cette pensée qui m'obsède le plus, la vie d'après. Est-ce que ce voyage, bien qu'il soit loin d'être terminé, a t-il déjà remis en cause la perspective de ces prochaines années ? Je crois bien que oui. C'est autant inquiétant que rassurant. Rassurant, car c'est la raison même qui nous a poussé à faire ce projet, bouleverser notre vision des choses, nos envies, nos objectifs. Inquiétant, car chaque nouvelle réflexion aussi infime soit-elle opacifie un peu plus le futur et sème le doute dans ce que je pensais ancré dans mon esprit. Avec un peu de recul, c’est surement cette ambivalence qui fait tout le charme d’une aventure comme la notre.
Comme vous pouvez le voir, on a beaucoup (trop) de temps de réflexion sur le vélo, revenons en à la journée.
Je me fais mal au genou sur le chemin pour les rejoindre pourtant sans avoir subi de choc particulier... La douleur ne partira pas dans les jours à venir, il va peut être falloir que je prenne du repos et rejoigne les autres plus tard.
On campe dans un champ d'oliviers le soir, loin du monde. On passe notre 1ère soirée à 4 dans notre nouvelle tente spacieuse où l'on peut s'asseoir sans toucher le plafond ! En bonus on peut cuisiner dans l'auvent à l'intérieur de la tente, voila qui va totalement transformer l'ambiance des soirées. Note pour plus tard : il faudrait éviter de sortir son matelas et sacs de couchages avant la cuisine car on en met partout, désolé Emilien et Rannou.
On se réveille sous une pluie fine qui devrait nous suivre sur les prochains jours. C'est l'occasion de tester nos nouvelles surchaussures récupérées à Athènes (ça marche, ouf !). On ne sait pas si c'est le gris environnant, la pauvreté du paysage ou la pluie, mais on se lasse assez vite de rouler en ce moment. Les pauses se font plus longues, plus fréquentes et personne ne s'en plaint. Le midi, on squatte la terrasse vide d'un restaurant fermé au bord de plage. On en profite pour leur pomper un peu d'électricité comme on adore faire.
Schéma similaire le soir où l'on s'abrite sous une terrasse de Airbnb fermé aussi. Ça ne vous paraît peut-être pas formidable mais pour nous c'est un petit luxe. Je "profite" que les 3 commencent un film pour rattraper mon retard des 6 derniers jours afin de publier ce journal.
Voila, c'est la fin de cette édition spéciale de 2 semaines, merci à vous si vous avez lu jusqu'au bout (aucun doute sur le fait que mmt49 en fera partie) ! Rendez-vous la semaine prochaine pour nos aventures racontées par Senghor cette fois-ci :)
Toujours un plaisir de vous lire, vous donnez envie les copains ! Même si ça vous prend du temps d'écrire tous ces articles c'est quand même top de pouvoir suivre votre périple et de voyager avec vous.
Bonne route!!
JJ
"Je n'ai presque plus aucune affinité pour cette espèce."... Attention, vous allez bientôt perdre une fidèle lectrice :-)...
Et pourquoi ne pas attacher une carriole à vos vélos pour mettre dedans tous les gentils chiens errants que vous croisez ? Vous leur feriez voir du paysage..... :-) Bonne route et à bientôt !